C’est un fait physiologique que nous expérimentons tous, et tous les jours: sans forcément bien le comprendre: avoir des émotions. Quel est notre rapport face à nos émotions ? Comment les accueillons-nous ? Comment les exprimons-nous ?

Nous sommes souvent aveugles et sourd face à nos émotions. Nous les cachons, nous les réprimons. Par habitude, parce que ce n’est pas bien, parce qu’il ne faut pas, parce que c’est un signe de faiblesse. Toutefois, tout ce qui ne s’exprime pas s’imprime – et notre absence d’éducation émotionnelle, au quotidien, nous pèse et nous coûte. Une facture qui, d’année en année, fait courir ses intérêts. Que ce soit physiquement ou psychologiquement. Vivre avec ses émotions, c’est vivre une vie (professionnelle et personnelle) plus épanouie, c’est mieux nous connaître.

En quoi être connecté à ses émotions est essentiel ?

« Être connecté à ses émotions est primordial à plusieurs titres, » insiste Catherine Gueguen dans son ouvrage « Lettre à un jeune parent », avant d’expliquer, point par point,

  • Pour votre vie affective. Si vous n’avez pas d’émotions, si vous n’éprouvez rien, si vous êtes indifférent aux personnes qui vous entourent, vous ne pouvez pas les aimer.
  • Pour votre travail. Si vous êtes indifférent à ce que vous faites tous les jours, si vous n’avez plus aucun enthousiasme, aucun plaisir dans votre travail, aucune motivation, vous ne pouvez plus travailler correctement.
  • Pour votre sens éthique et moral. Si vous ne ressentez rien vis-à-vis d’autrui, si autrui vous est indifférent, vous pouvez le maltraiter, et s’il souffre, cela vous est égal. Vous pouvez également agir de façon illégale ou injuste, car vous n’êtes ni perturbé, ni choqué, ni angoissé par ce que vous faites, vous n’éprouvez ni honte ni culpabilité.
  • Pour savoir prendre des décisions, faire des choix. Si tout vous est égal, vous ne pouvez pas choisir, vous ne pouvez donc pas orienter votre vie comme il le faudrait.

Avoir et reconnaitre ses émotions est donc essentiel. C’est aussi exprimer une forme d’intelligence que l’on nomme, simplement: Intelligence émotionnelle.

Des émotions à l’intelligence émotionnelle

« Les émotions sont là, avant tout, comme un signal, un message pour que vous preniez soin de vous: est-ce que ma vie correspond à ce que je souhaiterais vraiment ?«  énonce Catherine Gueguen, avant de rajouter: « Quand vous éprouvez du plaisir, de la joie, de la motivation, cela veut dire que ce que vous faites correspond à ce que vous aimez, à ce que vous êtes. Cela vous permet de mieux savoir vers quoi orienter votre vie, pour qu’elle soit en accord avec ce que vous souhaitez profondément. »

Afin de pouvoir réguler ses émotions, il s’agit d’être connecté à elles, de les nommer et de les exprimer sans culpabilité, sans jugements. C’est ce que l’on appelle l’Intelligence émotionnelle, qui se définit comme la capacité à exprimer et à comprendre ses émotions ainsi que celles des autres.

« On classe souvent les émotions en deux catégories: les bonnes et les mauvaises, » explique le professeur en psychologie et écrivain Ilios Kotsou avant de renchérir: « La tristesse, la colère, la peur font partie de celles que l’on évite ou que l’on refoule : je n’aime pas et je ne sais pas gérer donc je les repousse. Or, toute émotion est utile car c’est une information sur nos besoins et sur nos valeurs. Elle nous indique une direction de vie en lien direct avec ce que nous sommes au moment où nous les analysons. C’est pour cela qu’il est essentiel d’avoir une relation apaisée voire amicale avec toutes nos émotions, y compris avec celles qui nous dérangent comme la colère et la tristesse. »
Les émotions nous affectent, et affectent notre entourage: c’est ce que l’on nomme la contagion émotionnelle

Qu’est-ce que la contagion émotionnelle ?

« Il faut à peine 21 millisecondes, le temps de projection d’une image au cinéma, pour que deux personnes placées dans une même pièce synchronisent leurs émotions et leurs mouvements »

« Connaissez-vous le virus le plus contagieux sur Terre ?, » demande Christophe Haag auteur de l’ouvrage « La contagion émotionnelle« : « Ce n’est pas celui de la grippe ou d’Ebola, c’est celui de l’émotion. »

Effectivement, personne n’est indemnisé/immunisé face à ses émotions, mais aussi face aux émotions que ressentent et transmettent (émettent ?) les autres. Et à la question qu’est-ce que la contagion émotionnelle ?, Christophe Haag répond dans une interview du magazine Science et Avenir: « C’est un transfert d’émotions d’un individu à l’autre, une sorte d’onde qui peut, de proche en proche, toucher l’humanité entière. On peut le comparer à la contagion par un virus qui agit en quelques millièmes de seconde. Lors d’une rencontre avec quelqu’un, par exemple, on a tendance à adopter automatiquement ses expressions, ses comportements saillants (faciès, tonalité de voix, posture, langage corporel…). Ce mimétisme, immédiat, inconscient et automatique est une composante fondamentale des rapports humains. Selon la chercheuse Elaine Hatfield, professeure de psychologie de l’université de Hawaii (États-Unis), la contagion émotionnelle “primitive” a un rôle “adaptatif et fonctionnel” qui favorise la proximité sociale dans l’espèce humaine. »

Vous souhaitez un exemple de contagion émotionnelle ? Par exemple, d’après-vous, combien de temps faut-il pour contaminer une équipe ?

A Christophe Haag de répondre dans son ouvrage: « Comment le stress se répand-il ? Prenez cette étude menée par deux chercheurs de l’université du Michigan sur 70 équipes composées chacune de 4 à 8 personnes travaillant dans différents univers et différents métiers (comptable, personnel hospitalier, informaticien, steward, web-designer, responsable des relations publiques, etc.). Elle a révélé qu’il suffisait de deux heures de travail en commun pour que tous les membres d’un même groupe finissent par partager, de manière forte et prégnante, leurs émotions et leurs humeurs, que celles-ci soient bonnes ou mauvaises. »

« Mais sans doute faut-il beaucoup moins de temps encore que ça pour miner ou dynamiser un individu ou une équipe, si on en croit Elaine Hartfield et ses collègues: “ Le processus de contagion émotionnelle est extrêmement rapide. Il fallait, par exemple, à Mohamed Ali, pourtant connu pour être rapide comme l’éclair, 190 millisecondes pour repérer un signal lumineux et 40 millisecondes de plus pour répondre à ce stimulus par un coup de poing. Alors qu’il a été démontré au cours d’une expérience qu’il fallait seulement 21 millisecondes (le temps de projection d’une image au cinéma) à des étudiants pour synchroniser spontanément et inconsciemment leurs mouvements et les émotions qui vont avec.

Écouter les messages qui se cachent derrière nos émotions, comprendre les informations que celles-ci essaient de nous transmettre est essentiel. Partant, Emancipe vous propose d’expérimenter ce travail de conscientisation, de dialogue entre soi et ses émotions dans une formation pratique, en ligne. Cette formation de 3 heures se déroulera le mardi 2 mars 2021, de 18h30 à 21h30. Si vous souhaitez vous inscrire, cliquez-ici !

 » Être humain, c’est être une maison d’hôtes. Tous les matins arrive un nouvel invité. Une joie, une dépression, une méchanceté. Une prise de conscience momentanée vient. Comme un visiteur inattendu. Accueillez-les tous et prenez-en soin ! Même s’ils sont une foule de chagrins. Qui balaient violemment votre maison. Et la vident de tous ses meubles. Traitez chaque invité honorablement. Peut-être vient-il faire de la place en vous pour de nouveaux délices. La pensée sombre, la honte, la malice, rencontrez-les à la porte en riant. Et invitez-les à entrer. Soyez reconnaissants pour tous ceux qui viennent, parce que chacun a été envoyé comme un guide de l’au-delà, » La Maison d’hôte, poème de Rûmî

Sources: 

  • La contagion émotionnelle, Christophe Haag, ed. Albin Michel, 456 pages, avril 2019
  • Intelligence émotionnelle et management, Ilios Kotsou, ed. deboeck, 208 pages, mai 2019
  • Lettre à un jeune parent, Catherine Gueguen, ed. Les Arènes, septembre 2020, 159 pages